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eldorado

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route
Sapanta (en face, l’Ukraine), région de Maramures, Romania, août 2010

Mes bagages pour la route sont de plus en plus minces. Je veux lâcher prise, garder les mains libres pour saluer les oiseaux, les lents, les hauts oiseaux qui passent, et m’essuyer le front. Après tous ces choix difficiles dont aucun ne m’a délivré, je n’ai plus qu’à me laisser porter au fil du chemin qui serpente devant moi, le plus mystérieux, le plus étroit. Je laisse le chat à sa gamelle, quelqu’un viendra la remplir à ma place. J’emporte ce qui pèse le moins lourd, ce qui ne griffe pas : ton sourire songeur près du carrousel, ta petite robe d’été comme un nuage blanc qui flottait dans le feu de ce solstice-là. Le vent, les lunes et le silence m’accorderont leur bienveillance encore un peu, ils m’aideront peut-être à briser ces années mal fagotées qui strient maintenant mon regard. Il me tarde, à vrai dire, de remonter la source de mes inquiétudes, de te revoir dans ce premier jour ébloui, à peine habillée de diaphanes promesses. Je veux être riche de ce bout de vie là, de ce court instant qui m’a porté jusqu’à tes lèvres. Gagner la soutane d’un grand chêne ensommeillé pour te rêver toujours, oeuvre vivante, sans âge et sans limites.