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carnets de mars 2020

1er mars : la Fauvette à tête noire chante au jardin. Les mésanges s’absentent. Un petit champignon brun, du genre Galerina peut-être, à l’emplacement des menthes. Le tapis de Violettes odorantes s’étend, les primevères étoilent une bonne partie de la pelouse. Les jonquilles fléchissent déjà. Il y a du printemps dans l’air doux et vaguement sirupeux.

Quelques petits Hygrophores de mars en Chartreuse.

2 mars : il a fallu abattre le frêne en bordure du parc en face, atteint par la chalarose. L’extrémité de ses branches supérieures ne faisait plus de feuilles depuis deux saisons.

3 mars : la femelle de Merle noir s’active. Elle collecte des brins d’herbe sèche dans le jardin pour confectionner le nid dans la haie. Un peu triste de ne plus voir les mésanges.

A 20 heures, le chant discret du Hibou Moyen-Duc émerge du bosquet d’épicéas contre la colline.

7 mars : balade dans le Trièves venté. Des Papillons, la pourpre des premières Pulmonaires, le jaune des Tussilages, le bleu discret des Scilles à deux feuilles, des violettes blanches. Une larve de tique a réussi à me mordre entre deux doigts. Déjà.

La Nature s’épanouit dans le Trièves.

 

8 mars : les mésanges réapparaissent ! Le nichoir à insectes attire un ballet d’Osmies, ces petites abeilles cavernicoles à épaisse fourrure.

11 mars : la première morille en Chartreuse, à plus de mille mètres d’altitude. Déjà.
De l’herbe sèche dépasse sous le nichoir des mésanges. Je les vois s’affairer dans la haie.

Le jardin quelques jours avant le confinement.

 

Un mot : Covid-19. Le confinement sanitaire va compromettre une grande partie de mes sorties ce printemps. L’entreprise de ce carnet s’en trouve bouleversée. Jours de sidération.

 

20 mars : les Verdiers qui nichaient dans les Cyprès abattus en janvier ne sont pas partis très loin. Ils ont traversé la rue. Le mâle chante chaque jour depuis le sommet du cerisier du jardin d’en face. Du coup, je contemplerai plus souvent depuis le balcon cet arbre magnifique, qui se pare d’écume blanche. Dans la haie de lauriers-palmes juste à côté, à l’intersection des deux rues, les Merles nichent ici aussi. Le calme du quartier fait résonner plus fort les chants d’oiseaux.

21 mars : petite promenade d’une heure derrière l’immeuble. Des champignons ascomycètes de couleur sombre tapissent le talus (Gyromitra ou Pachyella?), des papillons, des fleurs.

Parmi les oiseaux : le Pic épeiche, la Mésange nonnette, le Roitelet huppé.

22 mars : même promenade que la veille, juste avant le crépuscule. Au bord du chemin fréquenté par les joggers, des Morilles ! L’heureuse surprise en plein confinement. Des Morchella deliciosa, loin de leurs sapins habituels. Je me demande s’il ne s’agit pas des déchets de cette espèce que j’avais rejetés à quelques mètres d’ici l’an passé… Aurais-je réussi à implanter des morilles issues des pentes des Hautes-Alpes ?

Joyeuse surprise ! Des morilles pointent en bordure du sentier derrière chez moi.

25 mars : retour au jardin du bureau. Tout est en fleurs : le Romarin, la Fétuque, les Labiacées, des Ficaires, et l’Amélanchier. Le Merisier est en plein débourrage, les Framboisiers reprennent de la vigueur.

Un Serin cini fait sa toilette dans le bassin. Cette espèce est particulièrement fréquente cette année dans le quartier.

La majesté un peu claudiquante des Tourterelles turques. Leur plumage comme de la porcelaine.

La Merlette est dans son nid. Mais les Mésanges ne sont plus là.

28 mars : cette fois, ce sont des Pézizes veinées qui constellent le talus derrière l’immeuble. Le confinement m’aura au moins permis de redécouvrir la Nature à moins d’un kilomètre autour de chez moi. Il y a aussi des Daldinia concentrica sur les Frênes tombés à terre.

La coupe évasée des Pézizes veinées sur le talus.

Premier chant du Pouillot véloce.

Le Prunier de la résidence est en pleine floraison. On m’avait pourtant signalé qu’il était mort, et qu’il fallait l’abattre.

30 mars : le beau temps se prolonge avec le confinement. Les soirs sur le balcon sont lumineux, amples et sereins. Magique serait le mot si le silence qui persiste n’était dû à une urgence sanitaire. En tous cas, cette situation réécrit notre rapport au monde. Elle le révèle tel que si nous n’étions pas là. Nous devenons les spectateurs de la vie sans nous.

Soirs confinés dans les chants et le silence.