à part soi

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la bondissante

la bondissante

grenouille

Grenouille rousse (Rana temporaria), Chambarans, Isère, juin 2010

Revenues de la forge des eaux, les grenouilles continuent de s’incliner devant soi, presque écrasées sous leur propre poids de gomme d’amidon et de caoutchouc verruqueux. Elles nous regardent avec une déférence exagérée, nous faisant croire à leur fragilité molle jusqu’à l’apitoiement. On en oublierait qu’elles sont capables de bonds de deux mètres, un hop! et puis c’est tout, que tout ce temps passé à nous scruter docilement les a gonflées d’un élan prodigieux, et qu’il est déjà trop tard pour tenter de les retrouver, évanouies dans l’éclair de leur saut sur l’inextricable écheveau de souches, de glaise et de feuilles mortes, là où la forêt recouvre notre curiosité d’un linceul aussi brun que définitif.

« Elles ont bondi, comme ce que l’on aurait tenu trop longtemps serré dans un poing de pierre ou de glace.  » (Philippe Jaccottet, Après beaucoup d’années).