à part soi

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tout ce que je sais du monde

tout ce que je sais du monde

matin après une nuit d’orage, Moldovita, Bucovine, Roumanie, août 2010

A trop laisser les mots tourner dans la tête, les mots ne tombent plus sur la page. Ils restent en suspension, comme des gouttes d’eau dans le brouillard, nimbant les paysages de mon crâne d’un rideau de crinoline. J’ai besoin de perspective. L’écriture, une autre, me rappelle ailleurs. Pâteuse, dense, cette encre-là noircit tout ce qu’elle touche comme du pétrole. Du blanc, du noir, et les couleurs dans ce tableau n’ont plus leur place.

Heureusement la Nature ces jours-ci flamboie. Il n’y a qu’à se pencher sur elle pour se rendre compte de toute cette grâce prodigieuse qui circule dans les plaines, et qui s’obstine à révéler la bienveillance de la terre. Abeille rousse et chrysomèle, verge-d’or et lilas bleu; nous frétillons tous les matins parmi les truites arc-en-ciel. Dommage que si peu s’en souviennent : n’est-ce pas ce givre tardif sur les paupières qui nous désunit?