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sri lanka express

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Ella, Sri Lanka, août 2011

Le petit serpent vert, fin comme une liane, que j’ai pris entre mes doigts à Sinharaja ;

Les parapluies sous la pluie, les parapluies sous le soleil;

Le bruit métallique des lames qui découpent le kottu roti en fin de journée ;

Nos pieds nus sur les chemins forestiers, bravant les sangsues ;

Les éléphants en maraude, les panthères assoupies, cet ours surpris en train de boire ;

Les cocotiers inclinés de la plage d’Uppuveli ;

Les chercheurs de pierres jaunes et rouges au fond du trou ;

Le pont de la rivière Kwaï et Jungle Boy ;

Les singes coiffés, les singes à rouflaquettes, les singes voleurs de fleurs ;

L’odeur des fleurs du frangipanier, qui continue après la fanaison, le parfum des caféiers en fleurs;

Les sourires échangés partout ; les dialogues esquissés par tous les moyens ;

Tout ce vert, cette verdure massive, qui étouffe et éclaire ;

Les renards volants électrocutés sur les fils ;

Le cobra dressé sur le perron ;

Les photos de bébés dans les tuk-tuk, les autobus décorés comme des sapins de Noël ;

La mémée qui nous prépare la soupe aux herbes à six heures du matin ;

Les petites épiceries sans vitrine ; le dentifrice ayur-védique, la crème de banane épilatoire ;

Les tambours sacrés ; la danse des éléphants costumés ;

L’introuvable Pirolle de Ceylan ; le chant du Coucou Koël par tous les temps ;

Les antennes nacrées des homards tapis sous leur rocher ; les poissons-coffres, les poissons-perroquets, les poissons-trompettes ; les poissons grillés au gingembre ;

Toutes ces maisons qui n’en sont pas vraiment ; ces enfants doux qui en débordent ;

Les mangues au goût de paradis sur le bord de la route; le filet de lime sur la papaye ;

Les terrines d’argile suspendues le long des routes ; le miel de palmier qui arrose le fromage de buffle ;

Les perruches qui font une nouvelle vie aux cités anciennes ;

Le crachin gris et froid de Nuwara Eliya, la brume tenace sur les rhododendrons d’Horton Plains ;

Les maisons coloniales délabrées ; la jungle autour ; des barbelés ;

Les mains caleuses des pêcheurs, leurs bouches édentées par le bétel ; leurs filets lourds de rien ;

Les crêpes à la banane à Ganesh Garden sur fond de rumeur océane;

Le thé au lait sous les vieux ventilateurs du Kandy Muslim Hotel ; les prières sous l’arbre sacré ;

Le couic-couic des margouillats ; l’appel à la prière à cinq heures trente ;

Le lit immense à Coconut Beach Lodge ; les moustiques sous la moustiquaire ;

Les rides crevassées au front des cueilleuses de thé tamoules ; Buddha qui te regarde encore, 2000 ans après toutes ces guerres et ces désastres ;

Et la conviction mille fois vérifiée que ce monde est beau, dans sa diversité sublime, et qu’il nous appartient plus que jamais de secouer les peurs qui empêchent l’amour.